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Circulez, il n’y a plus rien à prendre !

Edition N°1 – 11 janvier 2023

Arrivée à 12 h 19, la toute dernière cliente est encore servie. (photos rke)

Depuis le 30 décembre dernier à 12 h 20, le guichet CFF de Tavannes a bouclé son service de vente directe de billets, le même jour que trois autres agglomérations : Gland et Avenches (Vaud) ainsi que Loèche (Valais). En cause, la baisse constante de la demande. Les usagers grognent, mais s’en accommodent… à contrecœur. 

L’annonce officielle des CFF en milieu d’année dernière de fermer petit à petit ses guichets suit une logique implacable d’économie. « Aujourd’hui, à peine plus de 5 % des billets de transports sont achetés au guichet. Les passagers procèdent désormais plus volontiers par internet, leur smartphone ou via l’une des bornes digitales installées dans les gares », soulignait la régie fédérale dans un communiqué.

Depuis près de dix ans, les guichets helvétiques ferment tour à tour. C’était le cas en juillet pour les communes d’Herzogenbuchsee (BE), de Cham (ZG), de Pully (VD) et de Biasca (TI) et bien d’autres. Puis le 1er octobre, les centres de Sissach (BL), Wettingen (AG) et Zurzach (AG) ont également été bouclés. A la fin de l’année, les CFF comptaient encore 130 guichets desservis en Suisse, soit treize de moins qu’en 2021 et cinquante-cinq de moins que fin 2013. « Dans les Centres voyageurs de moyenne et de grande taille, le souhait d’un conseil personnalisé ne cesse d’augmenter, tandis que dans les sites de taille réduite, le nombre de clients continue de diminuer fortement », constatent les CFF. D’où ces fermetures successives pour les petites gares.

« Moins de contraintes de vente »

Toutefois, ces mesures ont des conséquences pour des usagers non équipés de smartphones ou d’ordinateurs. Restent les distributeurs à billets classiques implantés dans chaque gare, mais ceux-ci ne peuvent répondre à une demande plus large comme une réservation à l’étranger ou une place assise dans une voiture-restaurant. Néanmoins, il est toujours possible de se rabattre sur une hotline payante. « Au vu de la baisse des ventes au guichet, il faut être réaliste… Toutefois, on pourra quand même toujours donner un coup de main aux personnes en difficulté aux distributeurs », souligne Jean-Marc Wäger, agent du mouvement à Tavannes. Les employés resteront occupés aux tâches de la circulation des trains. « En effet, être au guichet est un métier à part qui prend du temps. On a un portail d’information pour les vendeurs à consulter au moins deux fois par jour, il faut être à son affaire et cela demande beaucoup d’énergie de répondre à la clientèle », ajoute-t-il.

Un moment symbolique

La fermeture du guichet CFF, le 30 décembre, marque une étape symbolique dans l’histoire de cette gare tavannoise qui existe depuis 1874. Une époque où les trains de grandes lignes, de marchandises ou wagons-restaurants transitaient par là jusqu’à la construction du tunnel de Granges en 1916. « Nos installations actuelles sont vouées à disparaître. On a de vieux système d’aiguillages et signaux mis en service en 1956 », ajoute Jean-Marc Wäger.

Télécommandé depuis Lausanne

Dorénavant, la majeure partie du réseau des CFF est télécommandée depuis les Centres d’exploitation ferroviaires de Lausanne, Zurich Aéroport, Olten et Pollegio (TI). Ces quatre centres réunissent la régulation, les opérations et l’information aux voyageurs, ainsi que la surveillance et la gestion des interventions sur l’infrastructure technique. Selon la régie fédérale, le regroupement de ces tâches permet d’améliorer la collaboration et le soutien mutuel en cas de dérangement. Progrès oblige.

Roland J. Keller

 

« C’est l’aspect humain qui m’interpelle »

Tavannes a donc fermé son guichet CFF et ce n’est pas pour plaire aux usagers que nous avons pu interroger sur place le vendredi 30 décembre. « Cela devient mort partout, c’est sidérant. J’ai l’abonnement annuel, mais pour les autres personnes, c’est désolant de ne plus pouvoir aller au guichet. D’autant plus qu’auparavant, il était même possible d’y changer de l’argent », déplore Matto Palumbo de Sonceboz. Marc, un autre usager, qui préfère taire son nom, estime quant à lui qu’il y a déjà peu de possibilités de s’informer sur le quai, alors fermer un guichet est encore pire. « C’est l’aspect humain qui m’interpelle. Où tout cela va-t-il s’arrêter ? Les gares qui deviennent de plus en plus vides, j’avoue que c’est un peu comme la disparation des caissières dans les magasins. Dommage. Je profite de venir dans la vallée de Tavannes, car c’est la dernière gare où il y a encore des employés des chemins de fer, d’ailleurs voués à disparaître », considère David Vuilleumier, conducteur de bus à Bienne et fan de trains, venu spécialement à Tavannes pour la petite cérémonie de fermeture du guichet.

(rke) 

 

Arrivée à 12 h 19, la toute dernière cliente est encore servie. (photos rke)