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Humoriste dans l’âme

Edition N° 2 – 22 janvier 2025

Emil: un humoriste aux multiples facettes que la célébrité n’a pas changé. (photo ©Filmcoopi Zürich)

Son bonheur? Faire plaisir aux gens!

Dans le cadre de la sortie de son film «Typique Emil» dans les salles de Suisse romande, l’artiste lucernois et son épouse Niccel ont donné un large aperçu de leur grande complicité dans un établissement public de la région où le temps a passé bien plus vite que d’habitude au moment de recueillir leurs impressions. On ne se connaissait pas, et pourtant les contacts établis durant une petite heure autour d’un café ressemblaient en quelque sorte à une amitié forgée de longue date. Signe qu’on ne se sent jamais plus à l’aise qu’en côtoyant des personnes humbles, authentiques et généreuses. Merci pour ces instants magiques ! 

Je ne vous cacherais pas que l’idée de pouvoir consacrer un article au phénoménal Emil dans le journal La Semaine me trottait dans la tête depuis quelques années déjà. Or, lorsque l’opportunité s’est présentée grâce à son passage à Delémont en marge de la sortie de son film «Typique Emil», la tentation était trop belle pour ne pas y succomber. C’est dans un espace discret d’un établissement public delémontain que j’ai eu l’immense chance de rencontrer Emil et Niccel pour un entretien qui devait être minuté, mais qui a forcément pris un peu plus de temps que prévu compte tenu du fait qu’on ne retrace pas une vie en vingt minutes. Qui plus est celle d’Emil, dont le cumul des casquettes pourrait sans autres figurer dans le livre Guinness des records. Comme j’ai pris le soin de me documenter sur sa carrière hors normes, j’ai tout d’abord voulu savoir comment ce grand timide s’y est pris pour inverser la tendance : «C’est la scène qui m’a sauvé !» s’exclame-t-il. «J’ai piqué des phares jusqu’à l’âge de 35 ans et j’en ai beaucoup souffert. Un jour, j’ai été contraint de monter sur scène pour un spectacle donné à Lucerne avec la troupe de cabaret à laquelle j’appartenais à l’époque et depuis ce jour-là, j’ai réussi à vaincre progressivement ma timidité.» 

Le fruit de la curiosité 

Employé de La Poste, Emil a notamment travaillé en Suisse romande dans les bureaux de Reconvilier, Malleray-Bévilard et Dombresson où il officiait en tant que buraliste : «Un jour, je me suis dit : Emil, tu ne vas quand même pas exercer un métier aussi ennuyeux jusqu’à l’âge de la retraite… J’ai alors embrassé une formation de graphiste à la Schule für Gestaltung à Lucerne.» Mais son rêve, c’était de faire le clown et il a pris son destin en main malgré les grandes réticences de ses parents qui s’opposaient farouchement à cette trajectoire prétextant avec insistance que c’était un «métier sans avenir». Or, vous en conviendrez, la réalité a plutôt donné raison à notre brave Emil. On se souvient notamment du succès retentissant qu’il a connu avec le cirque Knie en 1977 ou encore de sa lumineuse prestation dans la comédie satirique Les faiseurs de Suisses, sortie en 1978 avec la bagatelle d’environ un million d’entrées à la clé. On ne peut évidemment pas retracer les principales étapes de vie de cet auteur comique en passant sous silence son attachement à la Suisse romande sachant qu’il fut domicilié à Territet, près de Montreux, à son retour de New-York. Au fait, se sent-il plus proche de la mentalité alémanique ou romande ? «De par mon éducation rigoureuse, je dirais que je m’identifie davantage à la Suisse allemande au niveau professionnel, puisque je suis assez pointilleux, organisé et précis, mais que dans la vie privée, l’esprit d’ouverture et la légèreté des Romands me conviennent parfaitement bien.» Pour passer de l’anonymat à la célébrité en un temps record comme l’a fait ce comédien hors pair, il y a forcément un secret. Lequel est-il Emil ? «Il y a bien sûr le facteur chance qui est entré en ligne de compte, mais j’ajouterais encore deux éléments qui ont contribué à ce scénario improbable : le travail et la curiosité.» Pour conclure, nous lui avons demandé ce dont il est le plus fier dans sa vie et la réponse a fusé : «C’est d’avoir trouvé une femme intelligente et créative comme Niccel. Je suis le clown et c’est la magicienne», confie-t-il. Elle est arrivée dans sa vie, telle un cadeau, ce qui a encore décuplé son envie de réaliser des projets laissant une grande place à la fantaisie : «Mon bonheur, c’est de faire plaisir aux gens en réalisant des choses qui sortent de la normalité», signale-t-il. On le voit : le temps n’a pas d’emprise sur le rayonnement et la vélocité de cet artiste de 92 ans toujours frais comme une rose. Et quelle rose !   Olivier Odiet

Emil: un humoriste aux multiples facettes que la célébrité n’a pas changé. (photo ©Filmcoopi Zürich)