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Défier les lois de l’équilibre

Edition N°13 – 8 avril 2021

On s’active pour peaufiner les derniers préparatifs. (photos Patrice Neuenschwander)

Quatre jours durant, Joye Gerber et son équipe ont réalisé un parcours géant de plus de 30’000 dominos dans la halle de gymnastique du CIP à Tramelan. Histoire de rappeler qu’en 2007, l’Assemblée générale des Nations unies a proclamé le 2 avril Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, afin de mettre en évidence la nécessité d’améliorer la vie des enfants et des adultes qui souffrent de ce trouble.

Joye Gerber, technicienne en salle d’opération, atteinte d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA) sans déficience a une passion, la construction de parcours de dominos.

Ayant rejoint le comité de la jeune association Autisme Ressources et Compétences (AuReCo) créée le 21 mars 2020, elle a spontanément proposé la création d’un parcours géant de dominos en lien avec la journée du 2 avril. Proposition aussitôt acceptée.

C’est ainsi que lundi 5 avril la halle du CIP a été le théâtre d’une performance hors du commun qui aurait mérité une audience plus large. 

Pandémie et restrictions sanitaires obligent, c’est devant un parterre de quelques amis, des membres du comité d’AuReCo et des représentants de la presse que Joye Gerber a pu donner cours à sa passion et la mettre au service de la cause qu’elle défend.

Il a fallu plus de 200 heures cumulées par les constructeurs du parcours pour dresser et disposer patiemment de façon ingénieuse et artistique les 30’000 pièces, pour défier les lois de l’équilibre et de la gravité qui quelquefois ont donné des sueurs froides et contraint à remettre l’ouvrage sur le métier.

Entre tension et concentration

Les 19’000 pièces assemblées par Joye Gerber représentant le logo de l’association démontrent, si besoin est, ses compétences, sa parfaite maîtrise et son savoir-faire dans ce domaine. En entrant dans la halle peu de temps avant l’abaissement du premier domino, la tension et la concentration sont palpables.

Une dernière supervision du dispositif effectuée avec minutie, tout le monde retient son souffle. Joye et sa maman, mains jointes, poussent de leur index l’unique domino destiné à déclencher le processus. Aboutissement et soulagement, plaisir et émotion se mêlent, partagés par toutes les personnes qui assistent à ce spectacle étonnant. Franchissant des ponts, la chute des dominos progresse, abaissant tour à tour serpentins, pyramides, portraits, roses, spirales et autres figures géométriques. Le dernier domino tombé, la satisfaction et la joie sont de mises. Les applaudissements récompensent Joye Gerber et celles et ceux qui ont contribué avec elle à cette performance remarquable.

Pour l’initiatrice de cet événement, la construction de parcours de dominos est source de délassement, un moyen d’exercer sa créativité, son inventivité et de se déstresser.

Elle relève qu’elle a passé quatre jours magnifiques à réaliser cette performance grâce à un travail d’équipe, une bonne ambiance et l’excellente collaboration de chaque participant où chacun a pu apporter sa touche personnelle. Elle rêve déjà d’une nouvelle réalisation d’envergure.

Sensibilisation

Le lundi 5 avril, c’était aussi pour Joye Gerber le moment de sensibiliser les gens dits « dans la norme » aux troubles de l’autisme, loin des clichés éculés proposés par le monde du cinéma.

Si son trouble est qualifié sans déficience, elle a souffert et souffre encore du manque d’inclusion dans la société. Elle en appelle à une meilleure prise en compte des qualités et des besoins des personnes avec TSA, à une bienveillance et une solidarité propre à donner confiance plutôt que de s’arrêter à l’observation des « manques et défauts ». Elle en appelle aussi aux employeurs pour une meilleure inclusion dans le monde du travail afin d’offrir moyennant quelques aménagements un futur aux enfants avec TSA qui comme tout un chacun ont besoin de reconnaissance, de formation et de travail.

Il convient de rappeler que l’autisme si souvent mal connu n’est pas une maladie. On naît avec comme on naît avec des yeux bleus ou marron. Environ un enfant sur 100 naît avec un TSA plus ou moins prononcé et le taux d’enfants touchés par un TSA est en augmentation. Il est donc essentiel que la situation de handicap puisse être considérablement réduite par un environnement éducatif adéquat et des aménagements sociaux adaptés. Dans ce but, l’association AuReCo a déjà obtenu deux succès d’importance avec l’ouverture d’une classe pour enfants présentant des TSA sans déficience intellectuelle au Centre Educatif et Pédagogique de Courtelary en fonction depuis août 2020 ainsi que l’ouverture par la Pimpinière d’une nouvelle structure pour les enfants atteints d’autisme et de troubles du comportement prévue le 1er juillet 2021 à Sonceboz.

Patrice Neuenschwander

 

On s’active pour peaufiner les derniers préparatifs. (photos Patrice Neuenschwander)