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La CAJB tient un langage… ferme !

Edition N°30 – 24 août 2022

De gauche à droite: Gaël Monnerat, Tom Gerber, Virginie Heyer, Manfred Bühler, Ronald Sommer et Bernard Leuenberger. (photo pn)

Le 25 septembre prochain, le peuple suisse est appelé à se prononcer sur l’initiative sur l’élevage intensif. La Chambre d’agriculture du Jura bernois (CAJB) a décidé de mener campagne. Vendredi dernier, elle tenait une conférence de presse pour présenter ses arguments.

Sans détour, la CAJB invite à voter NON. Tous les intervenants ont relevé que la Suisse possède une législation sur la protection des animaux des plus sévères au monde, sinon la plus sévère.

Augmenter les exigences reviendrait à diminuer la production qui actuellement couvre un peu plus de la moitié des besoins du pays avec à la clé le renchérissement du prix de la nourriture. « Ce qui nuirait à la compétitivité de l’agriculture suisse et obligerait l’Etat à soutenir encore plus massivement les agriculteurs », selon Virginie Heyer.

Gaël Monnerat, président de la section romande de Suisseporcs ne mâche pas ses mots : «On nage en pleine hypocrisie alors que seul le tiers des produits labellisés trouvent preneur, les milieux hostiles à l’agriculture veulent encore durcir les conditions. Le but des initiants est de réduire drastiquement la consommation de viande dans la population en s’attaquant au portemonnaie du consommateur en créant un renchérissement de la viande suisse. » Le bien-être animal n’est que prétexte, selon lui. Il ajoute encore qu’il remarque chez les initiants, une absence de lien avec la réalité du terrain et du marché. Si l’initiative devait être acceptée, elle engendrera des conséquences désastreuses pour de nombreuses familles paysannes ainsi que pour la population qui devra se tourner vers le tourisme d’achat si elle entend continuer son mode de consommation avec des produits issus d’élevage aux normes moins contraignantes.

La preuve par les chiffres  

Si les initiants font campagne pour le respect de la dignité des animaux de rente, ce que Tom Gerber comprend, l’initiative lui reste en travers de la gorge. Il en marre de ces initiatives qui portent atteinte à la dignité des agricultrices et agriculteurs qui depuis des décennies ne cessent de s’adapter à des normes toujours plus contraignantes au point de décourager de nombreux producteurs agricoles.

Ronald Sommer, agriculteur bio depuis vingt-huit ans, parle en connaissance de cause, lui qui a dû abandonner sa production de fromage en raison des investissements exigés. La grandeur des élevages a été majoritairement revue à la baisse. Il n’est plus question d’élevage de masse et l’espace réservé aux animaux de rente a été systématiquement augmenté. Les chiffres avancés par Tom Gerber et Martin Eicher pour leur exploitation respective en atteste.

Une initiative qui fait mal au cœur 

La proximité du marché est une réalité pour Martin Eicher puisque les deux tiers de sa production porcine terminent sur les étals des bouchers de la région. Mais s’il devait adapter ses installations, il n’est pas certain de pouvoir y faire face. Manfred Bühler comme d’autres intervenants ne croit pas à l’importation de viande et d’œufs aux normes prévues par les initiants. Importations qui ne manqueraient pas d’augmenter pour faire face à une baisse généralisée de la production suisse. Il n’est pas sûr que la viande importée puisse répondre aux normes de l’initiative.

De plus les accords de libre-échange devraient être dénoncés.

Il en va de la liberté du consommateur. L’initiative attaque sa liberté de choix. C’est une initiative qui va au-delà de la dignité des animaux, c’est un choix de société, conclut Bernard Leuenberger. « Une initiative qui fait mal au cœur », témoigne Tessa Grossniklaus, agricultrice et secrétaire de la Chambre d’Agriculture du Jura bernois.

Patrice Neuenschwander

De gauche à droite: Gaël Monnerat, Tom Gerber, Virginie Heyer, Manfred Bühler, Ronald Sommer et Bernard Leuenberger. (photo pn)