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Le « Mur Daniel » a fière allure

Edition N°25 – 26 juin 2024

Daniel Huguelet devant la tour au drapeau. (photo bd)

Mais surtout, le muretier de Sonceboz a trouvé un complice et allié de choix en la personne de Daniel Huguelet de Frinvilier. Ce dernier est connu comme le loup blanc dans toute la région. Avant sa retraite, il était employé postal au tri du courrier et a même œuvré dans les wagons postaux un gros « stamp » à la main. « Tu voyageais surtout gratuitement ! » le brocardaient amicalement ses connaissances. 

Notre homme n’a pourtant jamais été ni un bras cassé ni un tire-au-flanc, bien au contraire. Ses loisirs, il les a longuement consacrés à l’accompagnement de mal-voyants ou d’aveugles complets sur les pistes de ski en appliquant avec rigueur les règles de cet art si particulier. Plus récemment il a aussi arrondi ses fins de mois en offrant ses bras et sa passion à des propriétaires désireux de mettre de l’ordre dans leurs jardins ou leurs immeubles. 

Bénévolat presque absolu

Reste que lorsque Romano Vicenzi l’a sollicité pour contribuer bénévolement à la construction du mur de pierres sèches de Sur la Rive, il a accepté sans hésiter. Puis, se prenant au jeu il y a consacré pas moins de 335 heures entre 2020 et 2024. Septante-deux voyages ont été nécessaires pour qu’il se rende, le cœur vaillant, sur les hauts de Bévilard. 

De là, la vue est magnifique sur les Alpes bernoises et les lacs de Bienne et de Morat. 

Le travail de muretier est éprouvant, mais les fondues d’Anja ou ses menus du week-end sont tellement ravigotants que l’effort était bien vite oublié. Le mur a été construit en suivant le tracé d’un précédent mur afin de remplir la même fonction de délimitation de prés destinés au bétail de la ferme.

Au bonheur des boutisses

Le muretier Romano Vicenzi n’est pas tombé de la dernière pluie. Sa méthode de construction est conforme à des pratiques ancestrales qui visent à consolider le mur en le faisant reposer sur une base large et solide. Il s’amincit légèrement vers le haut et est ponctué de pierres alignées de manière esthétique qui incitent les animaux de la ferme à ne pas tenter de le franchir. Par endroits, le muretier place ce que l’on appelle une boutisse, c’est-à-dire une grande pierre tout en longueur qui traverse l’édifice de part en part. Gages de solidité, les boutisses permettent aussi, lorsqu’on est bipède et pas bovin, de franchir plus aisément le mur. 

« Je ne sais si elles ont vocation de remplir ce rôle, se demande Daniel Huguelet, mais on peut le supposer. » La méthode de Romano Vincenzi consiste aussi à n’utiliser que des pierres telles qu’il les trouve à proximité de l’ouvrage et sans les tailler. Son œil avisé lui permet de pressentir l’assemblage final. Pendant qu’il construisait, Daniel Huguelet le voyait scruter chacune des pierres disponibles et soudain lancer avec détermination : « Celle-ci me parle ! » Il la saisissait et la posait à l’endroit de son choix, où elle s’adaptait à merveille. Le mur a été inauguré vendredi 7 juin par une journée exceptionnellement ensoleillée et en présence d’une délégation de sept amis belges de Daniel Huguelet. Il leur a si bien appris à aimer la montagne qu’ils ont accepté avec joie son invitation. La journée a été d’autant plus émouvante que Daniel Huguelet a entamé cette année une lutte contre un mal insidieux qui l’empêche de boire et de manger normalement. L’histoire du « Mur Daniel » est une belle illustration du nouveau combat qu’il mène désormais contre la maladie, avec la même force qui a accompagné chacune de ses entreprises.  

(bd)

Daniel Huguelet devant la tour au drapeau. (photo bd)